Ce texte accompagne la vidéo :
Tutoriel pour un poème (35 pixels)
Ce qui va suivre a un lien très étroit avec la vidéo « 35 pixels » que vous pouvez
trouver sur le DVD qui accompagne ce numéro de DOC(K)S. D'emblée, je vais
tenter de répondre à la question que m'a posée Philippe Castellin : « Pourquoi une
vidéo et pas un programme ? »
Je suis confronté à un problème qui risque dans l'avenir de devenir de plus en plus
problématique étant donnée l'orientation prise par mon travail qui cherche à
s'extraire de l'ordinateur personnel tout en gardant un lien fort avec celui-ci. « 35
pixels » s'appuie sur un programme informatique que je transfère dans la mémoire
d'un microcontrôleur (une sorte de petit ordinateur qui tient dans un seul composant
électronique). Ce microcontrôleur commande une matrice à leds qui fait office
d'écran. Sur les 64 leds présentes dans la matrice, j'en exploite 35, le minimum pour
pouvoir afficher des caractères ASCII. Le problème réside dans la réception du
poème. Dans mon travail, je suis attaché au côté intime de la lecture et je ne conçois
pas sa réception en dehors d'un espace privé, domestique. Une installation publique
aurait pourtant été plus simple, mais ce n'est pas ce que je veux. Idéalement, « 35
pixels » est installé chez soi, dans une pièce obscure. Sauf coupure du courant, le
programme ne s'arrête jamais ; le poème est une présence ; même quand je ne le
regarde pas, quand je suis dans une pièce adjacente par exemple, je sais que le petit
boƮtier noir poursuit ses calculs, que des lettres viennent remplacer des chiffres et des
chiffres effacer des lettres, que parfois on peut lire le mot « poème ». La vidéo
présente ici tente de rendre compte de cette expérience intime. Elle n'est pas le
poème. Elle en est une bifurcation. La piste sonore est une captation des sons dans la maison en même temps que le poème s'exécute. Deux « vies », celle des humains et
celle des machines, sans aucune interaction, intègrent ici un espace domestique.
Écrire un programme qui aurait tourné dans un navigateur Web par exemple ne pouvait pas fonctionner ici : l'ordinateur, la tablette, le smartphone sont des appareils bien trop complexes et bien trop courants, il me fallait un ordinateur minimal, ce à quoi je me suis attelé en assemblant quelques composants électroniques.
Dans la suite, je propose de fournir tous les éléments pour mettre en œuvre « 35 pixels » (schéma électronique et code informatique notamment). Je ne me fais pas beaucoup d'illusions, très peu d'entre-vous se lanceront dans l'aventure. Cependant une question me taraude : comment rester libre dans un monde d'automates sans descendre vers les couches les plus basses du matériel ? La question du matériel est pour moi essentielle. Les technologies libres (hardware et software) sont notre seule issue pour garder une certaine autonomie. Il faudrait pouvoir construire nos propres machines... Des machines poétiques.
Liste des composants électroniques :
1 carte Arduino Nano (intègre le microcontrôleur ATmega 328P)
1 contrôleur d'affichage à interface série MAX7219
1 résistance de 33 kΩ
1 condensateur de 100 nF (non polarisé)
1 matrice à leds 8x8 ELM-2881SURWA/S530-A2
Schéma du montage :
Tapez « 35 pixels » dans le moteur de recherche intégré au site :
https://entropie.org/3615/
Code source :
https://entropie.org/3615/download/35_pixels.zip
Archives
* Philippe Castellin est décédé en octobre 2021, le numéro de Doc(k)s en question n'est pas sorti.